Du geste empreint de courage d'une jeune femme Iranienne, il naît les instrumentalisations les plus risibles. Cette jeune femme n'est pas le symbole d'une lutte émancipatrice en Iran pour eux, c'est un outil afin de s'en prendre aux musulmanes ou la gauche.
Peu importe que des collectifs Iraniens comme Lettre de Téhéran, des figures de ce combat telles que Shirin Ebadi, se soient élevés face à ce funeste dévoiement contre les musulmanes en Occident. La droite ne s'intéresse guère à ce qui ne sert pas son agenda raciste.
Ce passage écrit par Lettre de Téhéran, au travail d'utilité publique au sujet de l'Iran, est à mettre en avant :
"Il est temps d'arrêter d'utiliser les femmes iraniennes qui sont harcelées, violées, torturées et tuées par le régime islamique dans le seul but de stigmatiser une partie de la population française, nourrir des polémiques franco-françaises et viser des ennemis politiques. Cette instrumentalisation se fait au prix de l’invisibilisation de leurs souffrances et ne véhicule qu'un seul message à leur encontre : le mépris.
En Iran, il existe des femmes voilées qui luttent contre le voile obligatoire. La lutte contre le voile obligatoire n'est pas une lutte contre les femmes voilées. Plus généralement, les Iraniennes et Iraniens luttent contre l'islam politique et non contre les musulmans qui sont leurs mères, leurs pères, leurs voisins, leurs collègues. Une chose que refusent de comprendre ceux qui, en France, veulent mettre un signe égal entre culture musulmane et islamisme.
La devise universelle "Femme, Vie, Liberté" met en première position le mot "Femme" , sans faire de distinction fondée sur la couleur de peau, la religion, les opinions politiques ou l'orientation sexuelle."
Il est à craindre que ces sombres dissimulateurs utilisent même de manière ignoble ces souffrances, et cela dans le but de s'en prendre au mouvement féministe. Dès lors, le combat de Caroline Fourest et co contre les dérives des dites néo-féministes ne concerne absolument pas cette jeune étudiante. De plus, il est consternant de transformer cette violence patriarcale des autorités Iraniennes en cible contre le féminisme. Plus précisément, ces individus ciblent les féministes prétendument extrémistes de Meetoo, celles qui critiquent leur ami agresseur condamné Nicolas Bedos, ou qui ne sont pas transphobes. S'ils peuvent utiliser les luttes des Iraniennes pour blâmer ces féministes, ils ne vont pas hésiter un seul instant. Cela donne d'autant plus de justesse à ce passage : "Cette instrumentalisation se fait au prix de l’invisibilisation de leurs souffrances et ne véhicule qu'un seul message à leur encontre : le mépris".
Il est venu le temps où les héritiers des colons d'Algérie, se métamorphosent en grands féministes. Cela constitue les héritiers de ceux qui diffusaient des images de femmes en indiquant que le dévoilement les rendrait jolies. Une femme ne se pense que dans le regard d'un homme apparemment. Si bien que la liberté n'était pas l'objectif quand ces derniers s'opposaient aux droits des femmes. Il était question de remplacer le patriarcat local par un patriarcat francais, blanc. Le silence est requis sur cette partie de l'Histoire coloniale. Sans surprise, l'extrême droite fait toujours de la femme à la maison son ultime projet, il y a juste à lire son programme. Or, il existe encore des Pilar Primo de Rivera, dignes de l'Espagne franquiste, ou des Serena directement issues de l'avenir promis par la Servante écarlate. Elles ont été motrices de la régression féministe, mis en avant par les hommes la souhaitant. Elle s'appelle désormais Thaïs d'Escufon, Marion Maréchal, Marine Le Pen, Sarah Knafo. La Sección Femenina du fasciste Franco a été renommée Némésis.
In fine, cette étudiante n'a pas risqué sa vie pour servir de caution à ce discours purulent, faux de l'extrême droite. Ces personnes font le pari que les jeunes femmes Iraniennes comme cette étudiante proclameraient en cœur avec eux leurs attaques virulentes contre le mouvement féministe, louant Nicolas Bedos comme une pauvre victime sacrificielle des "feminazis". Ce n'est pas certain...
Chers camarades, militants insoumis, la bassesse de la droite doit justement amplifier notre soutien aux Iraniennes, à cette jeune étudiante.
En 2012, l'actrice Iranienne Golshifteh Farahani avait posé pour un photographe. Elle avait une main sur un sein avec ses mots : "De vos rêves, je serai la chair". Ce n'était pas tout à fait dans une perspective de lutte féministe qu'elle avait pris ses photos, et elle n'avait pas prémédité l'engouement violent autour de cette image. L'artiste avait déjà fortement été jugé par le gouvernement pour s'être affiché sans voile, ce qui ici s'était aussi inscrit dans une démarche militante. Le gouvernement Iranien lui répond alors : "Vous pouvez offrir vos services artistiques ailleurs". En 2015, elle tient à rappeler à toutes les Iraniennes que leur corps enchaîné d'un tissu leur appartient, en s'affichant nue dans un magazine. Elle incarne la chair du combat. Elle ouvre cette génération de jeunes femmes qui vont oser braver le régime des Mollahs. La nudité dans tous les sens du terme devient une arme de contestation pour les Iraniennes, une réappropriation de leur corps, de leur esprit.
Il ne faut certainement pas aller sur ce débat émergeant sur la santé mentale de cette jeune femme. Ainsi, les autorités Iraniennes ont intérêt à diffuser cette version de l'Histoire. Dans les pays occidentaux, il n'est finalement pas si difficile de faire passer un mensonge pour une vérité, alors il ne faut pas imaginer les capacités de la dictature Iranienne.
Attribuer la folie à une femme révoltée est une vieille histoire du patriarcat. Tant de femmes internées à la Pitié-Salpétrière en témoigneront, récit auquel Victoria Mas a redonné vie dans le film Le Bal des folles. Tant d'Iraniennes pourraient aussi en témoigner. Se conformer à une société malade n'est pas le signe d'une bonne santé mentale.
Il faut considérer plus largement ce thème de la santé mentale. En effet, la jeunesse Iranienne est très affectée mentalement, et les suicides ne sont malheureusement que trop fréquents. C'est la faute à un système qui tue les Masha Amini, enferme les Toomaj Salehi, qui ne laissent pas une once de respiration, de liberté, reflet de l'hymne Baraye azadi. Risquer 10 ans de prison voire des violences, sa vie, pour s'être baladé en sous-vêtements dans la rue, voici le grand problème.
En se déshabillant, cette étudiante s'est opposée à l'aggravation des peines prononcées pour non-port du voile dans une loi de septembre de cette année. Notamment de manière inédite dans le cas d'une semi-nudité ou d'une nudité. Son geste porte en son sein la revendication que son corps lui appartenait avant d'être celui des Mollahs, avant de se soumettre à leur loi infâme.
La gauche ne fera jamais dans la sélection hypocrite et raciste, et cela, à la différence de la droite. Qu'elle soit Iranienne, Palestinienne, Ouïghour, Congolaise, dans le monde entier, la solidarité est pleine et entière à toutes les femmes en lutte, toutes les femmes opprimées, massacrées.
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